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Le déséquilibre Nord-Sud de laccès à linformation. | ||
Auteur: Xavier Dumont |
Date de publication: 09/2001 |
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Localisation: Ciberthèque > Participants > fra_doc_06/cap7.html |
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Chapitre 7
ANALYSE DU FORUM DU MONDE DIPLOMATIQUE
Le Monde diplomatique a ouvert sur son serveur en 1996 un forum de débats par courrier électronique sur le thème « Internet Nord-Sud ». Ce débat a été réalisé au moyen dun modérateur qui sest chargé de mettre en ligne les contributions des participants. Dans sa revue Manière de voir doctobre, nous trouvons les principaux points abordés lors du débat : quest-ce quInternet, les rapports de domination et de coopération Nord-Sud, au service des citoyens, quel Internet pour lAfrique, résister, sinformer, le coût des communications et enfin des solutions simples et accessibles. Au delà du contenu qui est consultable sur le site 1, nous tenterons de localiser les pays dorigine des 248 messages recueillis afin dillustrer le déséquilibre Nord-Sud de laccès à linformation.
Tableau 10 Répartition mondiale du nombre de réponses Il ressort de notre étude que 22 pays ont participé au débat : lArgentine, la Belgique, le Brésil, le Burkina Faso, le Canada, la Côte dIvoire, Dominique, lEspagne, la France, Haïti, Israël, lItalie, le Japon, Madagascar, les Pays-Bas, le Pérou, le Portugal, le Royaume-Uni, la Suisse, les USA et enfin le Venezuela. Parmi ceux-ci, les plus représentés sont la France (125 messages), le Canada (41 messages), la Suisse (29 messages) et la Belgique (10 messages). Figure 10 Taux de participation au forum du Monde diplomatique 2. Le taux de participation en fonction de lappartenance à la Francophonie Si on calcule le taux de participation en fonction de lappartenance ou non aux pays et gouvernements membres et associés à lAgence de la Francophonie, 10 pays francophones ont participé au débat : la Belgique, le Bénin, le Burkina Faso, le Canada, la Côte dIvoire, la France, Haïti, Madagascar, Dominique et la Suisse. 216 messages émanent de pays francophones, soit 87 %.
Tableau 11 Taux de participation en fonction de lappartenance à la Francophonie
Figure 11 Représentation sectorielle du taux de participation en fonction de lappartenance à la Francophonie 3. Le taux de participation francophone en fonction du critère Nord-Sud Si on calcule le taux de participation au sein des pays et gouvernements membres et associés à lAgence de la Francophonie en fonction dun critère Nord-Sud, on retrouve 4 pays du Nord (la Belgique, le Canada, la France et la Suisse) et 6 pays du Sud (le Bénin, le Burkina Faso, la Côte dIvoire, Haïti, Madagascar et Dominique). 205 messages émanent de pays francophones du nord, soit 95 %.
Tableau 12 Taux de participation francophone en fonction du critère Nord-Sud
Figure 12 Représentation sectorielle du taux de participation francophone en fonction du critère Nord-Sud
Conclusion
Ayant recensé 1.056.467 serveurs et 3.363.259 utilisateurs Internet au sein de lespace francophone, notre analyse a montré que ceux-ci étaient répartis de manière très inégale puisque 99 % des serveurs et 98 % des utilisateurs se trouvent dans les pays du Nord. De plus, notre analyse a permis de mettre en évidence que de fortes disparités subsistent au sein des pays du Nord dans la mesure où le Canada, le Nouveau-Brunswick, le Québec, la France et la Suisse représentent à eux seuls 92 % des serveurs et 85 % des utilisateurs francophones. Si nos données ne nous permettent pas de mesurer linfluence de la stratégie politique mise en place depuis le sommet de Cotonou, dans la mesure où il nexiste aucune donnée permettant la comparaison, nous pensons que la Francophonie témoigne néanmoins dune réelle volonté dassocier le Sud au développement des inforoutes. Enfin, lanalyse du forum du Monde diplomatique a montré que 87 % des messages provenaient des pays appartenant à la Francophonie et que parmi ceux-ci, 95 % émanaient du Nord.
Lidée développée par M. McLuhan dans les années soixante selon laquelle le monde est devenu un village global est un mythe. Il nen était rien à lépoque et il nen est rien aujourdhui. Toutefois, le maillage de la planète par des réseaux informatiques conforte la vision de Z. Brzezinski dans la mesure où les nouvelles technologies dinformation et de communication aboutissent à réduire la portée du contrôle des Etats sur linformation. La problématique du déséquilibre Nord-Sud de laccès à linformation peut être abordée au moyen du paradigme de linterdépendance, tel que théorisé par lEcole de linterdépendance complexe. En effet, de par leur prise en considération de nouveaux acteurs non-étatiques, R. Keohane et J. Nye ont contribué à élargir le cadre des relations internationales et leurs premières analyses transnationales permettront peut-être denvisager une véritable diplomatie des réseaux. En tant quenceinte internationale devant laquelle la problématique du déséquilibre Nord-Sud de laccès à linformation a été soulevée, lUNESCO a été au cur de la tourmente dun contexte international peu propice à des concessions. La libre circulation de linformation est devenue un enjeu de la Guerre froide et a constitué un contentieux entre les Etats. Ce processus a été principalement le fait de la révolution technologique, de la mondialisation des économies et des échanges et de linternationalisation du jeu des grands acteurs, Etats ou firmes. Centrées autour du monopole de linformation sur lequel les plus grandes agences de presse du monde régnaient sans partage, les revendications des pays du Tiers monde en faveur dun nouvel ordre mondial de linformation se sont soldées par un échec dans la mesure où celles-ci étaient en parfaite inéquation avec la doctrine américaine du « free flow of information ». Ayant établi, sur base des conclusions de la Commission MacBride, que la communication mettait en jeu la possibilité pour les hommes de vivre en bonne intelligence en acceptant lautre dans sa spécificité avec non plus le souci dimposer à cet autre un mode de vie et de pensée mais la possibilité de senrichir mutuellement au contact de cultures différentes, les Etats-Unis dénoncèrent les prises de positions de lUNESCO en faveur dun nouvel ordre économique et firent cesser le débat en quittant lorganisation. Depuis, vingt ans ont passé, la chute du mur de Berlin et leffondrement du communisme ont engendré de profondes mutations dordre politique, économique et technologique qui ont généré de nouvelles géographies, de nouvelles cultures et de nouveaux marchés. Les rivalités idéologiques laissent place à plus dinterdépendances économiques et dinteractions culturelles qui rendent floues, sinon caduques les anciennes divisions du monde. LEurope occidentale constitue avec lAmérique du Nord et la zone Asie-Pacifique une triade de puissances où se concentrent la plus grande aisance financière, les principaux conglomérats industriels et lessentiel de linnovation technologique. Le développement spectaculaire des nouvelles technologies de linformation et de la communication, dont Internet est la dernière innovation, ouvrent des perspectives inédites pour le développement éducatif et culturel et pour le progrès économique et social. Pourtant, au centre des avancées technologiques et de la mondialisation de la communication, certaines multinationales semblent prendre le relais des puissantes agences de presse des années septante dans la mesure où elles exercent des pressions sur les gouvernements du Sud, et en particulier africains, afin de libéraliser leurs anciennes télécommunications. Il est à craindre, quau-delà dune réelle volonté de câbler le Sud, ne se cache parfois quune logique de pénétration de marché ou pire dexploitation des ressources du Sud, le Sud se retrouvant une fois de plus au service du Nord. Contrairement à lidée répandue selon laquelle le monde ne serait plus quun village global, force est de constater que la mondialisation de la communication demeure lapanage des pays du Nord dans la mesure où ceux-ci ont tendance à protéger leurs technologies de pointe. Un scénario néo-libéral conduit inévitablement à un renforcement du déséquilibre Nord-Sud de laccès à linformation parce que la sophistication technologique lemporte bien souvent sur la recherche dun produit à moindre coût. Les nouvelles technologies de linformation et de la communication sont à priori loccasion dun rééquilibrage des flux dinformation entre les pays du Nord et ceux du Sud et Internet est susceptible daméliorer la situation du continent africain dans les domaines de léducation, de la santé, de la démocratisation, de lenseignement et de la recherche. Toutefois, la technologie ne pourra en aucun cas éliminer les causes structurelles du sous-développement. Si certains accusent le Sud dêtre en retard, nous tenons à souligner que contrairement aux pays du Nord, lintroduction dInternet y est relativement récente et que déjà le Sud apparaît comme de plus en plus différencié. Certains affirment que moyennant des lignes téléphoniques et des ordinateurs, le Sud sera rapidement connecté. Comme nous lavons dit précédemment, des solutions « clé sur porte » nexistent pas. Il convient dassocier le Sud à la démarche afin de laider à trouver sa propre logique de développement. Une collaboration avec le Nord est certes indispensable mais il serait souhaitable que cette collaboration se fasse de manière désintéressée. Une dynamique nouvelle permettrait alors de développer des contenus et créerait des coopérations entre pays du Sud. Puissent ces quelques lignes ne pas être perçues comme une atteinte au libéralisme mais comme une réelle volonté de faire dInternet un vecteur de culture et de connaissance et non le moyen dexpression du turbocapitalisme. 1 http://www.monde-diplomatique/Forum/nsnet2.
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